Alpes 1 – Entretien avec Jean-Marc Passeron

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Après une phase de difficultés et une mise en redressement judiciaire, l’avenir s’éclaircit pour Alpes 1. Leader toutes radios confondues sur les Alpes-du-Sud avec 23% d’audience cumulée, Alpes 1 commence également à conquérir le public grenoblois. Il y a quelques mois, la station a bien failli ne pas se remettre de la tentative de rapprochement avec Lv & Co. Aujourd’hui, Alpes 1 est entrée dans le périmètre d’Espace Groupe, dirigé par Christophe Mahé. Explications avec Jean-Marc Passeron, président et fondateur de la station.

RadioActu : Comment Alpes 1, qui a toujours été une station très florissante, en particulier dans les Alpes du Sud, est elle arrivée à un redressement judiciaire ?
Jean-Marc Passeron : Ce qui est paradoxal, c’est que Alpes 1 est une radio qui marche toujours aussi bien. C’est un cas unique en France, voir un symbole de la réussite d’une radio locale et de proximité. Grenoble commence aussi à bien démarrer en audience. Malgré ce constat, il y a quelques mois, la régie publicitaire a connu des difficultés. Elle avait été cédée à Lv & Co, qui l’avait confiée ensuite à Magnitude Régions qui a été placée en liquidation judiciaire. Nous nous sommes retrouvés face à la décision de la régie publicitaire d’arrêter complètement son activité.

RA : A ce moment là, vous vous étiez désengagé de la station ?
J.-M. P. : Je ne m’étais désengagé que de la régie publicitaire. J’ai toujours été à 100% propriétaire d’Alpes 1. Il n’y a jamais eu une cession de parts, mais j’avais cédé la régie publicitaire. Pendant deux an et demi, la régie n’a pas fait de bonnes affaires.

RA : Comment est née l’idée d’un rapprochement capitalistique avec Lv & Co ?
J.-M. P. : A l’origine, le groupe Lv & Co avait un vrai et très beau projet visant à développer en France un groupe de radios indépendantes qui gardaient toutes leurs autonomies et leurs propres identités, comme c’est le cas dans d’autres pays. Ce projet était mené en particulier par Christophe Sabot, alors directeur général de Lv & Co. C’était un projet très attrayant et j’y voyais là l’occasion d’aller de l’avant et de développer Alpes 1 dans le cadre de ce projet. Or, le premier dossier qui a été présenté au CSA est celui d’Alpes 1. Le CSA l’a refusé. Donc il n’y a jamais eu, un tant soit peu, de rapprochement capitalistique avec Lv & Co. Nous nous sommes contentés de leur confier la régie publicitaire, puisque Lv & Co avait comme filiale Magnitude Régions qui se disait spécialiste en la matière.

RA : Pour quelles raisons Lv & Co ne s’est pas désengagé de la SAS JMP, qui était la régie publicitaire d’Alpes 1 ?
J.-M. P. : Lv & Co faisait de la régie locale en province, via Magnitude. Ils le faisait à Angers, à Tours, à Nantes ou Marseille. Lv & Co considérait que cela faisait partie de leur métier d’être régie publicitaire, puisqu’il y avait une de leurs filiales qui le faisait. Le système aurait pu fonctionner.

RA : Qu’est-ce que ce groupement de radios aurait pu apporter de plus à Alpes 1 ?
J.-M. P. : Le but était de participer au développement d’Alpes 1 sur les départements limitrophes et à Grenoble que nous venions de lancer. D’autre part, pour moi qui était très engagé dans la radio, de déléguer une partie de l’activité en ayant une gestion plus sereine. Je pensais accompagner le groupe dans son développement si le CSA avait été d’accord sur ce schéma. Quand on refait l’histoire, à l’époque le CSA avait un oeil plutôt favorable sur ce rapprochement, même s’il l’a refusé après.

RA : Qu’est-ce qui a fait que le CSA a refusé ce rapprochement ?
J.-M. P. : Car il y a eu un lobbying d’autres opérateurs et de groupes de radios indépendantes qui ont fait pression pour s’opposer à ce projet d’acquisition d’une radio indépendante par un groupe national, même si MFM est le plus petit des réseaux. Le CSA a répondu défavorablement à ce projet. Je me dis qu’à l’époque, ce projet était suffisamment attractif pour prendre une dimension qui aurait été très concurrentielle par rapport aux groupes d’indépendants existants. D’ailleurs, certains d’entre eux font aujourd’hui la même chose, sans conserver l’identité et le rôle de proximité des radios, mais avec l’accord du CSA. C’est ça qui est surréaliste.

RA : Y a t’il eu un manque de transparence de la part de Lv & Co sur la véritable situation du groupe ?
J.-M. P. : Non. A leur décharge, s’ils ont attendu avant de trancher et de se désengager, c’est aussi parce qu’ils étaient engagés dans leur projet de cession à Lagardère. Ce sujet local n’était pas le coeur de leur dossier qui était de céder MFM et Voltage. C’est pour ça que ça a duré. Heureusement, nous avons trouvé une solution, mais ça aurait pu être très grave pour Alpes 1. Si on refait l’historique, le jour où les activités de la régie ont cessé, il y avait deux cas de figures. Soit la radio, qui n’était pas payée et qui avait deux mois d’arriérés, s’arrêtait. Soit je reprenais complètement en mains le dossier et les activités de régie. C’est ce que j’ai fait. A ce moment là, pour remettre la boutique en ordre être toujours offensif, il m’a paru très intéressant de me rapprocher du groupe de Christophe Mahé. Outre des affinités, nous avons le point commun de faire de la radio de proximité.

RA : Comment s’est opéré ce rapprochement avec Espace Groupe ?
J.-M. P. : Christophe Mahé est très enthousiaste sur le dossier Alpes 1. Il a des attaches dans les Alpes du Sud et à Briançon. C’est quelqu’un qui, dans tous ses dossiers, a la volonté de faire de la vraie radio de proximité, complètement faite localement. Grâce à la clairvoyance du CSA, et j’insiste là dessus, et des salariés, nous nous sommes serrés les coudes pour sauver cette radio qui est vraiment un symbole en France. Tous nos interlocuteurs ont joué le jeu et Christophe Mahé s’est engagé à reprendre tout le personnel et à ne rien toucher au format. Nous avons créé une deuxième vie pour Alpes 1, dans le périmètre d’Espace Groupe, avec Passeron à sa tête. Je reprends aussi en main les activités de régie. Cette reprise concerne les deux stations.

RA : Y a t-il quelque chose que vous regrettez ?
J.-M. P. : Non, car les deux radios ne se sont jamais aussi bien portées. Il y a à nouveau un vrai rapport de confiance avec les salariés. Et puis surtout, les liens avec Christophe Mahé me laissent penser que l’on peut faire plein de choses.


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