France Bleu – Entretien exclusif avec Philippe Chaffanjon, directeur de la station

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RadioActu : Vous avez pris la direction de France Bleu cet été après avoir dirigé France Info. Quel bilan tirez-vous de ces premiers mois à la tête de cette station ?
Philippe Chaffanjon : Je suis arrivé le 20 août dernier. Je suis très content d’être à France Bleu, c’est une radio comme je l’imaginais. France Bleu est une radio de grande qualité, généraliste, et la proximité est sa caractéristique principale et son gros vecteur de développement. C’est la seule grande radio aujourd’hui qui reste au contact de ses auditeurs et qui en fait son miel. Nous sommes là pour informer, pour rendre service et pour distraire les quatre millions de Français qui nous écoutent tous les jours dans toute la France. Plus on est proche d’eux, mieux on leur parle et plus ils nous écoutent, ce qui engendre un cercle vertueux. C’est donc ce travail-là qu’il faut faire, en trouvant des sujets qui les concernent et les accompagnent dans la vie quotidienne. Le matin et le soir nous sommes plus urbains, pour avoir un rôle d’aide à la mobilité avec les transports. C’est un exemple de la proximité que l’on peut apporter. Quand on fait ça et quand on le fait bien, on parle aux gens qui nous écoutent et cela fonctionne bien.

RadioActu : Votre stratégie s’inscrit-elle dans la continuité de celle menée auparavant, notamment par Anne Brucy et Christiane Chadal ?
Philippe Chaffanjon : Bien sûr. Il n’y a pas de baguette magique. Il faut creuser ce sillon-là et il a été bien entamé par les personnes qui occupaient à cette fonction avant moi. C’était la bonne direction et il faut donc continuer et intensifier cette stratégie. Il faut essayer de le faire encore d’une meilleure façon, car on peut toujours s’améliorer. Tous les jours nous travaillons, nous écoutons les matinales, nous serrons les boulons, nous travaillons sur la rythmique, la couleur de l’antenne, la programmation, l’information. C’est un chantier perpétuel et c’est ce qui est intéressant.

RadioActu : Avez-vous aujourd’hui le sentiment qu’il y a une véritable unité du réseau malgré les disparités régionales, depuis que la dénomination « Bleu » est devenue commune en 2000 à toutes les stations locales de Radio France ?
Philippe Chaffanjon : Oui. Quand on regarde la matinale, je pense qu’il n’y en a qu’une, même si nous en avons tout de même 43 spécifiques dans toute la France. Elles ont toutes en commun cette couleur « Bleu », avec ses règles de base, ses valeurs, son habillage. Il n’y a donc qu’une matinale, avec quarante-trois manières de la faire. Il y a en effet des bassins d’audience qui sont spécifiques. Chacune doit parler à ses auditeurs particuliers, avec des sujets qui les concernent spécifiquement. Chaque fréquence doit parler aux personnes qui les entourent, au milieu desquelles elle est installée. Ce qui m’intéresse, c’est que chacune des stations ait une conviction. En faisant ça, je pense que France Bleu est d’ailleurs la radio du groupe Radio France qui a vraiment des auditeurs à gagner. Il y a une vraie mine à creuser dans ce domaine-là. Beaucoup de radios professent l’amour de la proximité et veulent le faire mais ne savent pas le mener comme France Bleu. Ce n’est pas en mettant des gens au téléphone toutes les demi-heures qu’on fait de la proximité. En revanche, quand France Bleu se déplace sur un marché deux fois par semaine, accompagne les gens le matin au travail, là nous sommes vraiment avec eux.

RadioActu : Depuis quelques années, l’image de France Bleu semble être devenue plus contemporaine, moins désuète. Est-ce une radio plus moderne aujourd’hui ?
Philippe Chaffanjon : C’est une radio qui est à l’image des gens qui l’écoutent, c’est ce qu’elle souhaite. Il faut donc qu’elle soit effectivement qu’elle reflète l’ensemble de la population française. Cette image que vous décrivez a existé à une époque. Dès qu’on est en-dehors de Paris, on croit qu’on est avec des gens qui s’intéressent moins à la culture. Il y a une vraie coupure entre Paris intra-muros et le reste du pays et si l’on s’intéresse à ce qui se passe ailleurs, on est forcément ringardisé. C’est une erreur. Le réseau France Bleu est un réseau professionnel réalisé par des personnes très compétentes et qui intéresse de plus en plus de gens. C’est une très bonne nouvelle pour la radio en général et pour nous en particulier.

RadioActu : À Paris France Bleu (107.1) a eu beaucoup de difficultés à s’imposer et s’est cherchée pendant des années. Aujourd’hui, elle réalise 2,2 points d’audience, soit 200 000 auditeurs à Paris, c’est à dire l’équivalent d’une très bonne performance pour une radio locale en région. Comment expliquez-vous ce succès ?
Philippe Chaffanjon : L’équipe de France Bleu 107.1 travaille d’arrache-pied tous les jours pour réussir à intéresser les Parisiens. C’était effectivement très difficile puisque le marché concurrentiel est très important dans la ville. Mais l’équipe a trouvé un créneau qui est complètement en phase avec les valeurs de France Bleu, c’est-à-dire de s’imposer comme une radio de service, qui assure notamment l’aide au transport et à la mobilité. De manière générale, nous avons constaté que les gens écoutent France Bleu quand ils ont des difficultés de transport. Comme Paris est une ville où il est de moins en moins aisé de circuler, je suis très optimiste pour France Bleu 107.1. C’est sur le produit que nous faisons notre audience, et non par l’affichage. Si nous avions le même budget communication que les autres, ça laisse supposer que nous grimperions encore plus dans les sondages.

RadioActu : L’ouverture de France Bleu Saint-Étienne est attendue pour le printemps 2013. Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Philippe Chaffanjon : Il ne faut pas trop s’avancer. Je m’en tiens à ce qu’a dit Jean-Luc Hees à la rentrée en ce qui concerne ce projet, qui devrait voir le jour dans le courant de l’année 2013. Je ne peux pas garantir autre chose.

RadioActu : Quelles difficultés rencontrez-vous sur la création de cette station ?
Philippe Chaffanjon : C’est simplement compliqué d’ouvrir une radio aujourd’hui. Il n’y a pas de raison particulière, c’est un ensemble de paramètres à prendre en compte. Lancer les stations de Toulouse et Le Mans cela n’a pas été évident non plus. Ce qui est certain, c’est que France Bleu Saint-Étienne ouvrira en 2013, probablement plus vers la fin d’année qu’au début. Mais notre volonté est toujours d’ouvrir cette station.

RadioActu : Le budget de Radio France va diminuer de 0,5% l’année prochaine. Dans quelle mesure le réseau France Bleu sera-t-il impacté par ces restrictions budgétaires ?
Philippe Chaffanjon : Je ne peux pas en parler car les arbitrages budgétaires ne sont pas encore terminés. Nous en saurons plus je pense vers début janvier.

RadioActu : France Bleu a mis en ligne un nouveau site internet, mais il y a eu quelques ratés au démarrage. Que s’est-il passé ?
Philippe Chaffanjon : Il y a toujours des ratés au démarrage d’un site, mais il faut bien le lancer un jour. Le site de France Bleu est extrêmement compliqué à gérer car il y a notamment une double géolocalisation, à la fois sur les quarante-trois players et sur l’information. La France est découpée en 600 rectangles et des informations sont agrégées selon l’endroit où vous vous trouvez. Tout cela a nécessité des réglages qui sont aujourd’hui réalisés et cela fonctionne désormais. Nous sommes enfin ouverts aux contributions des journalistes et animateurs puis progressivement tout va rentrer dans l’ordre. Il y aura encore des affinages à faire, comme le réglage des filtres concernant la géolocalisation, mais nous tenons le bon bout.

RadioActu : Vous parliez de la richesse du contenu qui est assuré par les journalistes et animateurs en région. Des échos font part de quelques difficultés, comme une surcharge de travail…
Philippe Chaffanjon : Tout à fait. Il y a bien une difficulté. Mais une négociation a lieu parallèlement sur les nouveaux médias à Radio France et elle n’est pas encore terminée. Nous attendons donc qu’elle aboutisse pour régler tous ces problèmes puisqu’il y aura un texte qui encadrera l’activité de toutes les personnes qui contribueront au site. Il ne concernera pas seulement France Bleu mais toutes les stations de Radio France. Tant que cet accord n’est pas signé, ce n’est donc pas simple et cela génère des difficultés à la contribution de tout le monde. Cette situation devrait être réglée d’ici la fin de l’année.

RadioActu : Quel temps consacrez-vous dans votre travail pour aller sur le terrain. Allez-vous régulièrement en régions ?
Philippe Chaffanjon : J’y vais toutes les semaines, sans exception. J’y prends beaucoup de plaisir et j’espère pouvoir le faire encore plus. C’est indispensable pour moi d’aller dans les stations locales, de discuter avec les journalistes, les animateurs et les techniciens.

Crédits photos : Radio France – Christophe Abramovitz


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