France Inter – Entretien avec Jean-Louis Foulquier

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Cette année les Francofolies de La Rochelle vont fêter leur vingtième anniversaire. Lorsque tu as créé ce festival, en 1985, imaginais-tu que cette manifestation connaîtrait un tel succès et une telle notoriété ?
Jean-Louis Foulquier : Non, vraiment, pas du tout ! Je me disais : « l’important, c’est de le faire une fois ». J’avais le truc dans la tête et je me suis dit : « cette fois ça marche ou ça ne marche pas, mais si ça ne marche pas, je n’aurais pas de frustration, je l’aurais fait ». J’aime bien vivre mes rêves plutôt que rêver ma vie. Je me suis donc dit : « Je le fais et on verra bien ! ». Comme ça a marché dès la première année, moi, j’avais un vieux rêve : c’était de réaliser une fête autour de Léo Ferré en train de diriger son propre orchestre. Je me suis dit : On va faire trois festivals comme ça, ça me donne encore deux ans pour organiser la fête de Ferré. Et puis, au bout de trois ans, on s’est dit, on va aller jusqu’à cinq, A cinq ans, on s’est dit, ce serait trop con de ne pas fêter les dix ans… Et voilà comment on se retrouve maintenant pour la vingtième édition !

Cette vingtième édition ne sera pas comme les autres puisque, c’est la dernière fois que tu es à la tête de Francofolies. Pourquoi partir ?
J.-L. F. : Oui, c’est effectivement les dernières Francofolies dans lesquelles je m’implique. Là, j’arrête. Didier Varrot va reprendre la direction artistique avec l’équipe. Et puis, pour la suite, je ne sais pas encore… Mais, en tous les cas, moi je vais m’en écarter. Je resterais peut-être comme consultant pendant un petit moment s’il y a besoin, mais je n’ai plus envie d’avoir de responsabilités au sein du festival. Là c’est la dernière génération d’artistes. Il faut entre sept à douze ans pour faire aboutir les choses. Là, voilà, la dernière vague est sur la grande scène. Il y en a d’autres que j’accompagnerais peut être à travers les chantiers des Francofolies, mais je ne me voyais pas repartir pour voir sur la grande scène ceux qui vont balbutier maintenant et qui seront peut-être là dans dix ans. Moi, dans dix ans, tu vois, je serais en chaise roulante… (rires) Peut-être pas en chaise roulante, mais j’aurais du mal à monter les escaliers de la grande scène !

Quels vont être les grands rendez-vous de cette année auxquels tu tiens particulièrement pour tes dernières Francofolies ?
J.-L. F. : Il y a notamment un clin d’oeil au Québec avec Cabrel. Il y aura une fête avec des gens comme Isabelle Boulay, Natasha St-Pier, Daniel Lavoie, des grandes voix québécoises. Il y a Charlebois qui sera là aussi. Ca c’est un clin d’oeil parce que l’idée de faire ce festival, je l’ai eu quand j’étais au Québec. Donc, d’une certaine manière, je voulais leur rendre. Et puis les premières Francofolies hors de France, après La Rochelle, ça a été les Francofolies de Montréal. Après, ce que je souhaite pour cette année, c’est bien sûr d’essayer de réussir sur le plan de la programmation une édition complètement dans l’esprit des Francofolies, c’est à dire avec un mélange des styles, des genres, des générations et que l’éventail soit le plus large possible. Et puis, la cerise sur le gâteau, c’est Jean-Jacques Goldman qui s’est chargé du dernier spectacle de ma dernière édition. Il fait « Chansons pour Jean-Louis » le 17 juillet sur la grande scène. Je ne sais absolument pas ce qu’il y aura dedans et puis, vraiment autour de moi, personne ne veut m’en parler ! Je ne sais rien, ça m’énerve ! J’ai l’impression de ne pas dominer le truc…

Le succès des Francofolies s’est, entre autres, construit sur le concept « des fêtes à ». De quelle manière va-t’on retrouver cela cette année dans la programmation ?
J.-L. F. : En plus de Goldman et de Cabrel avec les chanteurs québécois qui restent dans cet esprit, il y a aussi Romain Dider à La Coursive (NDLR : avec Kent, Enzo Enzo, Alain Leprest..). Il y a aussi Passi avec « Dis L’heure 2 Zouc » et pas mal d’invités. On retrouve donc ce concept, mais on ne le refait pas systématiquement comme on a pu le faire avec des artistes comme par exemple Véronique Sanson car ça se fait beaucoup ailleurs maintenant. Et d’ailleurs c’est tant mieux ! Moi, je trouve que lorsque tu as une idée, tu l’appliques, ça fonctionne, c’est repris, c’est plutôt bon signe. Quand on a monté les Francofolies, il n’y avait quasiment pas de festivals d’été. Il n’y avait plus de tournées, il n’y avait plus rien, on disait que ça fonctionnait pas. Maintenant, les festivals de chansons, ça commence en mai et puis ça ne s’arrête jamais. Il y en a plein et moi je dis tant mieux. Je n’ai jamais eu de sentiment de jalousie ou exclusivité. L’important, c’est que mieux ça marche pour la chanson, plus les chanteurs ont d’endroit pour s’exprimer et mieux la chanson risque de se porter.

Si tu abandonnes la direction des Francofolies, en revanche, tu vas justement continuer à t’occuper du chantier des Francofolies. Quel est l’objectif de cette opération ?
J.-L. F. : C’est une espèce de stage de formation, un peu comme les rencontres d’Astaffort avec Cabrel. Lui, il s’intéresse plus aux auteurs et nous, on s’est dirigé plus vers les auteurs interprètes. Je vais effectivement continuer à suivre ce qui se passe dans les chantiers des Francofolies et m’y impliquer de temps en temps. En plus, on va normalement avoir un lieu à partir de la rentrée. C’est toujours passionnant de voir les choses naître. Au bout du compte, les jeunes artistes sont souvent très solitaires. Ca se croise de temps en temps, mais ils savant rarement à qui s’adresser, ils connaissant peu de monde. Pendant une semaine, à chaque fois, il y a cinq six groupes. Ca leur permet de faire des échanges et puis ils ont la sensation d’avoir une écoute parce qu’ils savent que je viens, que certains vont se retrouver à passer dans des émissions de radios, qu’ils risquent peut-être d’être programmé aux Francofolies. Il y a un véritable échange.

Depuis toujours, tu as contribué à faire émerger de nouveaux talents de la chanson française. Quelle est ton opinion au sujet de toutes ces émissions de télé comme la Star Academy ou Popstars ?
J.-L. F. : Il y a toujours eu des radios crochets ou des trucs comme ça, des concours. Mireille Mathieu est sortie d’un truc comme ça qui se passait le dimanche après-midi à la télé. Mais là, au-delà du concours, ils ont fait un truc télé réalité où l’on rentre un peu dans le people et où l’on sort un peu du music-hall. En fait, la différence avec ce qui se passait dans le temps à l’époque de Mireille Mathieu, c’est que dans ce genre d’émission, quand il y avait un mec qui tenait dix, quinze ou vingt semaines, il y a des producteurs et des maisons de disques qui venaient lui faire des propositions et qui s’intéressaient à son cas. Là, les mecs démarrent mais ils ont déjà signé un contrat alors qu’on ne sait même pas ce qu’ils valent. La différence, elle est là. Ce sont des opérations de marketing et comme toute opération de marketing, ça dure le temps de la vente… Alors évidemment, dans le lot, il y aura peut-être une Jennifer et deux ou trois qui feront des carrières. Quelqu’un comme Jennifer, Star Accademy ou pas, il y a des chances quand même qu’au bout du compte elle aurait sûrement fait un disque, mais peut-être moins vite. Et puis d’autres, c’est star bidon marketing et la chute sera d’autant plus terrible pour eux… Et c’est évident qu’il y aura la chute.

Quel sont tes projets après les Francofolies ?
J.-L. F. : On termine les Francofolies de La Rochelle le 17 juillet, disons le 18 juillet le temps de récupérer un petit peu. Je pars tout de suite après tourner « La Frégate d’Eté » de TF1 pour 2005. Je tourne autour du 20 juillet jusqu’à fin juillet. Je tourne une quinzaine de jours au mois d’août, je tourne au moins de septembre et au mois d’octobre. Je m’embarque tout de suite dans une série. J’ai de la chance, je n’aurais pas le temps de penser, je pars tout de suite dans une autre aventure. Et puis, il y a la radio sur France Inter. Normalement, s’ils ne me virent pas, je continue avec j’espère « TTC » et « Pollen ».


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