A la tête de Radio France depuis le 12 mai, Jean-Luc Hees suscite déjà des émois. Le PDG de Radio France s’est en effet invité dans le 7-10 de France Inter pour répondre à Edwy Plenel, président fondateur de Médiapart et invité de la station. Venu présenter son manifeste intitulé « Combat pour une presse libre », Edwy Plenel a notamment évoqué les risques d’un « rapport clientéliste des médias à l’Etat », soulignant le fait que la nomination des PDG de l’audiovisuel par le gouvernement pourrait poser problème. Jean-Luc Hees, alors en voiture à l’écoute de France Inter, est arrivé dans les studios et a pris la parole à l’antenne. « Ce soupçon qui concerne la nomination des présidents de l’audiovisuel public est infondé », a alors déclaré le responsable de Radio France. « Je comprends votre vigilance et ce combat nécessaire. Nous sommes alliés, c’est ce que je suis venu vous dire ». Les deux hommes ont poursuivi leur discussion. « Il vaut mieux aboyer fort, déranger et réveiller le quartier qu’être indifférent » a expliqué Edwy Plenel, Jean-Luc Hees de lui répondre « on va vous laisser aboyer ». Pourtant, devant son audition devant le CSA dans le cadre de la procédure de nomination, Jean-Luc Hees s’était formellement engagé à ne pas reprendre le micro.
Après cette intervention, la CGT Radio France a vivement réagi dans un communiqué. « L’indépendance de Radio France en danger ! Chacun à sa place ! Le nouveau Président a du mal à trouver la sienne » indique le syndicat. « On a jamais vu une telle situation à Radio France (…), un PDG qui déboule dans un journal pour prendre la parole », déplore la CGT. Rappelant que Jean-Luc Hees veut se positionner en tant que « garant de l’indépendance », le syndicat estime que ce dernier « prouve le contraire ce matin par ses actes, en s’imposant sur l’antenne d’Inter ». La CGT de Radio France « s’est longuement inquiétée de l’indépendance du nouveau PDG vis à vis de l’Elysée (…) Jean-Luc Hees (…) a demandé à être jugé sur ses actes. Et bien c’est fait. Le soupçon s’est matérialisé au quatrième jour… » conclut-elle.
Pour sa part, le Syndicat National des Journalistes de Radio France s’inquiète, lui aussi, de cette intervention du président, évoquant une « troublante intrusion ». « Cette prise directe de l’antenne est de même nature que la nomination directe. Elle ne s’encombre pas de nuances. Elle bouscule les distances et les règles. Elle dit : « J’ai le pouvoir donc je fais ce que je veux ». C’est une grande nouveauté. Une nouveauté troublante » explique le SNJ. Après cet incident, le syndicat craint l’autocensure et redoute que la tentation « de ne plus inviter ceux qui diront quelque chose de contrariant sur notre PDG, et sur celui qui l’a nommé », ne devienne trop grande. Alors que la nomination de Jean-Luc Hees à la tête de Radio France, première nomination par le président de la République, avait soulevé de nombreuses polémiques, cet évènement risque bien d’attiser les craintes des syndicats. « Que cela plaise ou déplaise à Jean-Luc Hees, avec tout le respect que nous continuons à lui porter, la question du mode de désignation du PDG de Radio France est bel et bien un problème énorme », estime le SNJ. « Ce problème pèse et pèsera sur ses épaules qu’il le veuille ou non, et ce n’est pas en déboulant sur les antennes qu’il s’en déchargera » conclut le SNJ.
.: L’intervention de Jean-Luc Hees (à 14’15 ») :.
Edwy Plenel face à Jean- Luc Heesenvoyé par franceinter. – L’info internationale vidéo.
