Jean-Paul Baudecroux (NRJ Group) – « Je suis très fier que la première radio de France soit française »

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Quelle est votre analyse des résultats d’audience publiés par Médiamétrie ce 19 novembre ?
Jean-Paul Baudecroux : Nous sommes très satisfaits. NRJ confirme sa place de première radio de France et progresse beaucoup, puisqu’elle gagne 425 000 auditeurs en un an. NRJ fédère 6 506 000 auditeurs par jour. Nous sommes donc la première radio de France. Ce critère est donc comparable au nombre de lecteurs pour la presse, au nombre d’entrées au cinéma ou au nombre de visiteurs pour un site internet. C’est donc bien cela qui compte. L’historique sur 3 ans indique que RTL nous dominait, avec près d’un million d’auditeurs de différence. L’avance s’était réduite de moitié et nous avons ensuite stoppé cet écart avant d’inverser la tendance, puisque nous dominons aujourd’hui RTL, avec 229 000 auditeurs de plus. Je tiens a associer ces résultats à l’excellent travail des équipes, sous l’autorité de Morgan Serrano et de Gaël Sanquer.

Les résultats sont moins bons pour les autres antennes du groupe, spécialement pour Chérie FM et Nostalgie. Comment analysez-vous ces chiffres ?
Jean-Paul Baudecroux : Ils sont très bons pour Rire et Chansons, puisque les indicateurs sont en progression : 33 000 auditeurs pour l’audience cumulée. La part d’audience progresse également, ainsi que la durée d’écoute, qui s’allonge de trois minutes. Nous sommes donc satisfaits pour cette station, en progression sur tous les indicateurs. Chérie FM n’est effectivement pas encore tout à fait calée. Le souci est à ce niveau. Mais nous allons beaucoup travailler sur le produit. Cela a déjà commencé, bien que les résultats ne soient pas encore au rendez-vous. Nous avons une belle marque, qui est aidée maintenant en télévision avec Chérie 25. Je ne suis pas très inquiet sur le moyen terme.
Les scores sont en retrait pour Nostalgie, mais la dernière vague été très bonne. On observe un petit tassement, mais nous pensons que les fondamentaux sont bons car nous progressons sur les 50 ans, ce qui est encourageant puisque Nostalgie a été reformatée complètement et ce travail commence à payer. Lorsque que nous rentrons dans le détail des chiffres, nous constatons que les choses vont dans le bon sens.
Enfin, je voudrais ajouter qu’au global, 12 200 000 auditeurs
écoutent une des radios du groupe, soit une progression de 185 000 auditeurs sur un an. Nous sommes la première offre radio de France et la première offre radio sur les 25-49 ans, cible qui intéresse le plus les annonceurs, avec 17,9 points de part d’audience.

Sans transition, la direction de NRJ ne s’est pas positionnée au sujet
du buzz autour de Guillaume Pley. Quelle est votre réaction par rapport à la vidéo réalisée par ses soins, qui a circulé sur internet ?
Jean-Paul Baudecroux : C’est une tempête dans un verre d’eau. Je suis pour la liberté d’expression : on ne fait pas de censure, il n’y avait pas matière à faire du bruit. Bruit qui est d’ailleurs retombé aussi vite qu’il est né. Quelques personnes sont venues manifester la nuit devant la station, mais c’était vraiment très anecdotique.

Avec le recul regrettez-vous de ne pas avoir racheté RMC, quitte à vous séparer de Rire et Chansons, quand l’occasion s’était présentée, il y a dix ans ?
Jean-Paul Baudecroux : Je regrette évidemment puisque j’avais signé les accords de rachat de RMC. Cela m’avait même coûté un dédit et j’ai dû y renoncer contre mon gré, parce qu’un recensement de la population avait été publié entre le moment où j’avais signé le rachat de RMC auprès des Laboratoires Fabre et le moment où nous allions passer devant le CSA. Ce recensement faisait apparaître une forte augmentation de la population française, qui nous faisait de facto franchir le plafond des 150 millions [seuil anti-concentration de 150 millions d’auditeurs potentiels, ndlr]. Cela nous mettait en infraction par rapport à la loi. C’est donc contraint et forcé que j’ai dû renoncer à RMC. Ce n’est pas du tout une erreur stratégique, parce que la loi, qui n’a pas bougé depuis 1994, fixe le même plafond, 150 millions. Comme la population française a fortement progressé, ce plafond baisse mécaniquement à chaque fois que la population augmente.

NRJ détient une chaîne TNT en région parisienne. Envisageriez-vous de procéder, comme vous l’avez fait en radio, à la constitution d’un réseau national en rachetant des télévisions locales en province ?
Jean-Paul Baudecroux : Nous pourrions syndiquer, mais la réglementation est très contraignante. Ce n’est donc pas facile, d’autant que les télévisions locales ne sont pas encore dans cet état d’esprit. Effectivement j’y avais pensé, et j’y pense toujours. Mais ce n’est pas dans les esprits, alors que cela aurait du sens.

Si le cas se présente, envisagez-vous de reprendre une autre chaîne de la TNT comme l’a fait Bolloré ?
Jean-Paul Baudecroux : Tout est une question d’opportunités et de circonstances. Pour l’instant, nous sommes en phase de développement de Chérie 25. Si des opportunités se présentent, nous saurons les étudier.

Votre offre de webradios est très importante. Quel bilan tirez-vous de cette diversification ?
Jean-Paul Baudecroux : Nous sommes jusqu’à présent très satisfaits de cette stratégie puisque la marque NRJ est synonyme de musique, pas seulement d’un genre, mais de toutes les musiques. Cela nous permet d’élargir notre champ d’action dans des univers musicaux qui dépassent ceux destinés à la marque NRJ en hertzien, ce qui permet d’aller explorer des territoires nouveaux. Je suis satisfait de ce développement, d’ailleurs j’accorde une attention toute particulière aux webradios. Nous avons réalisé plus de 47,5 millions de sessions actives de plus de 30 secondes durant le mois d’octobre. C’est très encourageant et nous avons là une avance considérable.

Où en est le groupe NRJ à l’international, est-ce encore une priorité ?
Jean-Paul Baudecroux : C’est toujours une priorité, nous développons la marque à l’international via des filiales ou via des franchises. Nous sommes le premier groupe européen de radios sous la même marque, NRJ, et nous allons même au-delà puisque nous sommes présents dans 14 pays, dont le Canada et la Russie. Cela nous donne de la puissance et nous permet notamment de mutualiser des jeux concours, de faire gagner des choses qu’aucune autre radio ne peut offrir, ce qui renforce la marque. Je suis donc très satisfait même si le développement est long. Par ailleurs, ce développement n’est pas facile en Allemagne, par rapport à celui de Bertelsmann en France, puisque les autorités françaises ont donné à ce dernier des centaines de fréquences radio et télévision sans s’assurer que la réciprocité existe. En effet, nous n’avons jamais obtenu une seule fréquence en Allemagne. Notre présence dans quelques villes allemandes n’a été due qu’à l’épaisseur de notre carnet de chèques. C’est quelque chose que je dénonce régulièrement depuis des années.

Où en est la vente de TowerCast ?
Jean-Paul Baudecroux : Je n’ai pas de commentaire à faire pour le moment sur ce sujet. TowerCast est une filiale qui se porte très bien, son chiffre d’affaire et sa rentabilité progressent.

Sans préjuger de la date de votre départ, comment est-ce que vous voyez l’avenir du groupe dans 10 ans ?
Jean-Paul Baudecroux : Je ne suis pas encore à l’article de la mort, je n’ai que 67 ans et je suis contre la retraite à 60 ans. Je pense au contraire que lorsque quelqu’un arrête de travailler, sa santé n’est plus aussi bonne. J’ai lu des études très intéressantes sur le sujet, grâce à la Fondation NRJ, créée pour faire progresser la recherche médicale en neurosciences. Ces études indiquent que lorsque l’on arrête de travailler, le cerveau perd ses capacités. Cela favoriserait la maladie d’Alzheimer. Le cerveau est comme un muscle : quand il fonctionne moins, il s’atrophie.

Qu’est-ce qui est le plus excitant à vos yeux : la radio, la télévision, l’internet ?
Jean-Paul Baudecroux : J’aime toujours autant la radio car ce média s’adresse à l’imaginaire, et que l’imaginaire de chacun est sans limites. C’est un média très très efficace sur le plan publicitaire, qui génère du trafic et permet de vendre. C’est donc un média chaud, de réactivité. Personnellement j’aime beaucoup la radio, mais j’ai découvert la télévision, qui est passionnante également. Quant à l’internet, j’ai toujours su qu’il était le meilleur ami de la radio et de la télévision. Le succès des flux audio et vidéo, de plus en plus consommés, est énorme. Plusieurs programmes marchent très bien sur internet, alors que ce sont des fichiers en replay. Je persiste et signe sur l’idée qu’internet est le meilleur ami des médias.

Quelle est la position du groupe NRJ concernant la radio numérique à ce jour ?
Jean-Paul Baudecroux : Nous étions les premiers à y croire il y a 20 ans. Nous avions même financé une diffusion de NRJ en DAB. Malheureusement, il y avait plus d’émetteurs que de récepteurs. Cette situation a duré des années. La radio numérique terrestre est déjà obsolète avant même d’avoir été réellement lancée, d’ailleurs les constructeurs de récepteurs sont loin de se précipiter dans cette aventure, car il n’y a pas d’interactivité. La radio sur IP est interactive et permet d’acheter le titre que vous écoutez, de voter, de le partager sur un réseau social. Qu’est-ce qu’apporte la radio numérique à côté de ça ? Aucune de ces fonctions, qui sont essentielles aujourd’hui, à l’heure d’internet. La radio numérique ne permet pas de répondre à l’interactivité d’internet, elle est donc obsolète. On voit bien que les résultats ne sont pas au rendez-vous dans les pays où elle a été lancée. C’est une technologie qui arrive trop tard.

Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?
Jean-Paul Baudecroux : Je suis quelqu’un qui a beaucoup de chance, je fais ce que j’aime. Je suis très fier que la première radio de France soit française !


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