Le Mouv’ – Marc Garcia dresse le bilan

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Directeur du Mouv’ depuis 1999, station dont il fut l’un des fondateurs, Marc Garcia est l’une des grandes figures de la FM françaises. C’est dans les années 70 qu’il entame sa carrière en réalisant « Campus », sur Europe 1, aux côtés de Michel Lancelot. Entre 1974 et 1976, Marc Garcia créé le nouvel habillage d’antenne de Radio Monté Carlo avec Michel Berger et Jean-Michel Jarre. Dans les années 80, en pleine vague des radios libres, Marc Garcia collabore, avec Pierre Bellanger, à Radio Cité Future et à la création de Radio Nova avec Jean-François Bizot. En 1986, Marc Garcia prend la direction d’antenne d’Europe 2, station dont il fut l’un des fondateurs, sous l’impulsion de Franck Ténot. Avec Patrick Fillioud et Laurent Pérallat, il lance le réseau et met en place les programmes locaux sur les 120 stations abonnées.

A partir de 1990, alors chargé des programmes d’Europe 2 et des questions artistiques du développement, il collabore à Evropa 2 (République Tchèque), Europa Plus (Moscou), Cadena Top (Espagne), Radio Salu (Espagne), Radio Zet (Pologne). Marc Garcia rejoint Radio France en 1994 et sera responsable de la programmation musicale de France Inter jusqu’en 1997. Débute alors l’aventure du Mouv’, la dernière née des stations nationales de Radio France. Pour RadioActu, Marc Garcia dresse le bilan de premières années d’existence du Mouv’, de sa place au sein de Radio France et des perspectives d’évolution de la station.

RadioActu : Quelles sont les raisons qui ont amené Radio France à se poser la question de la légitimité d’une radio jeune qui a abouti à la création du Mouv’ ?

Marc Garcia: Le projet était dans l’air. La preuve, c’est qu’une de mes motivations pour rejoindre le service public, c’était de me dire que le service public était condamné à se repositionner par rapport au marché ou à lentement disparaître. Je me suis dit que c’était intéressant d’aller voir ce qu’il allait faire et je n’ai pas été déçu puisque je suis arrivé au mois d’octobre 1996 et que quelques mois après on m’a demandé de me pencher sur la problématique d’un bouquet de programmes pour Canal Satellite. Je suis arrivé sur la fin du mandat du président Maheux et au moment de la nomination du nouveau président par le CSA, tous les candidats avaient dans leurs cartons la création d’un programme pour les jeunes. D’abord parce que l’on voit bien que tous les grands groupes radiophoniques ont une offre de programmes pour les jeunes. Pour Radio France, le problème était encore plus criard, puisque ça s’appelle « service public », et en fait ça mériterait « service du vieux public », car toutes les chaînes de Radio France, à l’exception notable de France Info qui a une structure d’audience normale, ont un public majoritairement de plus de 35 ans. L’audience de Radio France se porte bien mais est fortement déficitaire de moins de 35 ans. L’idée de créer une offre de programme pour combler ce déficit était une préoccupation du milieu des années 90. Lors de l’arrivée de Michel Boyon à la présidence, il y a eu deux candidatures internes : celles de Patrice Duhamel et celle de Pierre Bouteiller, mon patron direct. J’étais alors responsable de la programmation d’Inter et j’ai travaillé à un projet de programme pour les jeunes à partir de 1996. Michel Boyon avait indiqué alors que le déficit des moins de 35 ans, et donc le fait que L’audience de Radio France n’était pas en phase avec le reste de la population françaisel’audience de Radio France n’était pas en phase avec le reste de la population française était un problème et qu’il fallait travailler au rajeunissement des chaînes. Un producteur de France Inter, Olivier Nanteau, que je connais bien, a été nommé responsable de ce projet et nous avons commencé à y réfléchir ensemble. Il faut savoir que ce projet couvrait aussi une envie du nouveau pouvoir politique, puisque Jacques Chirac venait d’accéder au pouvoir et que, au lendemain de son élection, remportée en partie grâce à un électorat jeune, il a pris des mesures en faveur des jeunes. De là à penser qu’il s’est tourné vers le service public en disant « et les jeunes ? », il n’y a qu’un pas. Ce que je peux remarquer, c’est que Philippe Douste Blazy, qui était alors Ministre de la Culture, a été très militant sur ce projet, et je sais, pour en avoir été le témoin, que la première personne qui a officialisé le lancement de cette radio, ce n’est pas le président de Radio France, mais le Ministre de la Culture au cours du Midem 1997, et le lendemain, Michel Boyon l’a officialisé. Donc, c’était un projet naturel, car il y a toujours un problème de déficit des jeunes dans l’audience de Radio France. Le contexte de la radio de cette époque là, c’était les émissions de libre-antenne triomphantes qui faisaient croire que c’était la forme qu’il fallait employer pour les radios jeunes. C’est d’ailleurs comme ça que s’est inscrit Le Mouv’ au départ, et sur ce chapitre là, le service public a très vite déclaré que la façon dont les jeunes étaient traités par les radios commerciales était indigne et qu’il y avait quelque chose d’autre à faire. Parallèlement, une réflexion était menée sur le problème des nouveaux supports de diffusion, car le service public est riche de son historique, des spécialités et des spécialistes qui n’ont pas été sacrifiés sur le terrain économique. Donc pour savoir quoi mettre dans ces nouveaux tuyaux, Radio France ne manque pas de spécialistes. Si j’ai rejoint le service public à ce moment là, c’est parce que je me suis dit qu’avec le numérique et les nouvelles formes de diffusion, Radio France pouvait être l’endroit où il se passerait des choses.

RA : Ce qui veut dire que Le Mouv’ avait été conçu à l’origine pour une diffusion hertzienne traditionnelle ou pour les nouveaux supports comme le câble ou le net ?

M.G. : Tout a été conçu en même temps. C’est aussi vraisemblablement quelque chose qui a compliqué la naissance du Mouv’. Il fallait d’emblée raisonner entièrement en numérique et non pas selon des modes productions traditionnels. Le site Internet du Mouv’ est donc né en même temps que la radio. C’était le premier site de Radio France et c’était aussi la première radio numérique du groupe. Mais devant la non-réussite, en tout cas lisible, du Mouv’ encore aujourd’hui, France Info a été présentée comme la première radio numérisée du groupe, et l’ADPM a été présentée comme la chose qui a fait naître Internet à Radio France. Tout ça est une façon un peu révisionniste de vivre la propre histoire du Mouv’.

RA : Est-ce que ce n’est pas ça qui a brouillé le message au départ ?

M.G. : Je pense que oui, et on a aussi beaucoup mis en avant au début du Mouv’ tous ces aspects là. Lorsque Le Mouv’ a été lancé, nous avions des années-lumière d’avance, y compris face aux concurrents les plus impliqués sur ces offres de programmes, que ce soit NRJ ou Fun. Il y avait des données associées sur Le Mouv’ bien avant qu’il y en ait ailleurs, et malheureusement ça n’a pas été pérennisé et transformé, probablement parce que les moyens n’ont pas suivi.

RA : Ce qui veut dire que Le Mouv’ est en train de revenir à un schéma plus traditionnel ?

M.G. : Oui. On voit bien qu’aujourd’hui ce qui fait la réussite du Mouv’, c’est qu’il y a des auditeurs. Ce n’est ni sa communication, ni ses données associées, ni son site Internet qui, même s’il existe, est d’une pauvreté rare par-rapport à ses concurrents directs, en terme de téléchargement, sur ce type de public. Sur les plus jeunes, ont voit que la place de la musique que ce soit sur Internet ou par-rapport aux consommations culturelles, est extrêmement importante.

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