RadioActu : Quel bilan dressez-vous pour cette saison pour les radios du groupe Radio France ?
Jean-Paul Cluzel : Je vois bien que la radio connaît un problème d’insertion dans l’univers multimédia. Il y a trois concurrents évidents, qui sont la télévision, Internet et la presse gratuite. A partir de cela, nous avons entrepris une réforme à France Inter. Il faut poursuivre le travail de qualité éditoriale sur France Info. Les axes ont ainsi été définis depuis un certain temps. J’espère bien qu’à la rentrée tout ceci va porter ses fruits.
RA : Vous déclarez « prendre acte de la baisse de l’audience de France Inter » et vouloir apporter des « améliorations significatives ». Comment cela va t’il se traduire pour France Inter ?
J.-P. C. : La grille de France Inter va être profondément renouvelée. L’information et les journaux vont également être améliorés. Pour résumer, nous mettrons en place des journaux sérieux pour des gens sérieux.
RA : Ce qui est déjà le cas aujourd’hui, malgré tout ?
J.-P. C. : Oui mais nous présenterons moins de faits divers, plus de mise en perspectives, plus d’international, de culture, d’économie et une politique moins politicienne. Je pense que nos auditeurs attendent que France Inter, en matière d’information, leur en apporte encore plus.
RA : Ce qui va se traduire par plus de magazines ?
J.-P. C. : En fin de journée, de 18h à 19h, nous allons confier à Jean-Marc Four un grand magazine sur l’international, ce qui je crois est unique dans toutes les radios. De 9h à 9h30, Vincent Goze va présenter un magazine d’actualité culturelle, lui aussi unique. Nous allons essayer de donner des clés pour comprendre le monde avec plusieurs nouveaux magazines culturels et un magazine sur la science à 14h.
RA : La deuxième tendance de ces résultats Médiamétrie est la baisse de France Info, qu’en pensez-vous ?
J.-P. C. : Quand on regarde les autres radios, nous nous rendons compte que la Coupe du Monde de football ne nous a pas profité. Ce qui n’est pas complètement étonnant vu le format de la radio. Nous ne pouvons pas faire ce que fait RMC Info, d’ailleurs nous le ferions moins bien. De plus, nous nous devons, par rapport à notre mission d’information, d’avoir beaucoup plus de journaux que les autres stations. Il faudra voir ce que cela donne à la rentrée, mais RMC Info plafonnait depuis plusieurs trimestres. Si elle décolle, il faut, je pense, voir l’effet Coupe du Monde.
RA : N’aurait-il pas été judicieux de diffuser des matchs en FM sur France Inter au lieu de les laisser sur les grandes ondes ?
J.-P. C. : Très franchement je n’y crois pas. Je ne pense pas que ce soit la diffusion des matchs en direct qui ait fait le succès de RMC Info, mais plutôt les commentaires sur le football. Ce n’est pas un problème de direct mais de manière de traiter le sport à la radio. Nous avons d’ailleurs commandé une étude sur le sport qui nous a été livrée juste avant la Coupe du Monde et nous allons essayer de la mettre en place. Je ne pense pas que ce soit la diffusion des matchs en direct qui a joué pour RMC. RTL et Europe 1 les ont également diffusés et pourtant cela n’a pas changé grand chose. Mais je pense que le succès incontestable de RMC Info pendant cette période, c’est la manière de restituer ce phénomène de société qu’est le sport. Je ne dis qu’il faille copier cette radio mais elle recueille, à juste titre, les fruits d’un travail d’investissement sur la façon de traiter le sport, qui va au delà de traiter un match en direct.
RA : Pour ce qui est France Musique, vous parlez de la concurrence de Radio Classique, même si vous ne faîtes pas la même chose. Quel est votre avis sur la question ?
J.-P. C. : Je pense avoir été un des rares, lorsque Radio Classique a changé son format, à dire attention c’est un danger pour nous car nous ne pouvons adopter le même format. Nous n’allons pas faire du RMC Info, ni du Radio Classique, ce n’est pas le rôle du service public. Tout le problème, et c’est le défi qui se posent à l’équipe de France Musique, c’est de garder ce qui fait France Musique, c’est-à-dire des oeuvres qui appartiennent à un répertoire étendu. Le travail est de faire accepter ces musiques au public. Nous avions également demandé une étude sur France Musique. A travers elle, nous avons constaté que les auditeurs demandent la musique dans son intégralité et des clés pour la comprendre. Le tout avec des commentaires qui soient accessibles, pédagogiques et une présentation plus chaleureuse. Il faut conserver la même qualité avec plus de chaleur radiophonique.
RA : France Culture elle s’inscrit dans la stabilité avec une durée d’écoute qui augmente. Quelle conclusion en tirez-vous ?
J.-P. C. : C’est la radio qui nous pose le moins de problèmes. Je suis persuadé que France Culture continuera sa progression lente mais régulière, car elle est dans un créneau complètement unique. Par ailleurs, le travail effectué est de grande qualité et les modifications apportées par David Kessler à la rentrée rendront la grille plus lisible.
RA : Le Mouv’ vous apporte une réelle satisfaction. Vous avez obtenu une nouvelle fréquence à Montpellier qui est une grande ville universitaire…
J.-P. C. : Le format du Mouv’ est très bon et original. Pour progresser, il faut d’avantage d’émetteurs. Nous n’avons que 17 émetteurs et cette fréquence à Montpellier est importante. Je peux vous annoncer, puisque que la lettre a été signée hier par le Ministre de la Culture, que nous allons obtenir une fréquence à Bordeaux, sous réserve d’approbation par le CSA. Nous travaillons à renforcer à la spécificité du Mouv’, c’est à dire une musique encore plus diverse et un accent sur l’information pour les jeunes. Nous allons également introduire une nouveauté. Les auditeurs, encadrés par la rédaction, pourront transmettre leurs productions à l’antenne.
RA : Pour France Inter, avez-vous fixé à Frédéric Schlessinger des objectifs pour la saison prochaine ?
J.-P. C. : L’un des inconvénients du service public est de devoir dévoiler mes cartes bien malgré moi, puisque nos producteurs s’en chargent. Je ne sais pas ce que préparent nos concurrents mais je pense qu’ils vont faire part de leurs réactions face aux résultats. Tout le monde va réagir, comme nous, nous réagissions. J’attends donc de voir ce que la concurrence va proposer. Mon objectif sera bien sûr d’arrêter cet effritement de l’audience.
