Radio France – Entretien avec Jean-Paul Cluzel

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RadioActu : Comment analysez-vous globalement les derniers résultats d’audience de Radio France ?
Jean-Paul Cluzel : Je pense qu’Europe 1 et RTL ont bénéficié de la grève qui a touché France Inter, France Info et France Bleu. Mais surtout, l’ensemble du média radio est confronté à des enjeux très importants, en particulier avec le développement du on demand sur Internet. Notre site a atteint plus de 10 millions de visites et je suis intiment persuadé que ce sont des champs sur lesquelles nous devons travailler. Mais le coeur de notre métier passe par un travail qui va commencer et que je poursuivrai autant que nécessaire, par petites touches significatives de changements d’une grille qui n’a quasiment pas évolué depuis six ans, dans le cas de France Inter.

RA : Pour France Inter, vous vous êtes fixés des objectifs qualitatifs ou en termes d’audience ?
J.-P. C. : Les deux. Qualitativement, c’est ce que j’appelle l’élargissement de l’audience. Nous n’allons pas seulement faire revenir les auditeurs qui ont pu nous quitter, en particulier les 35-49 ans, car c’est la grande faiblesse de toutes les généralistes et sur laquelle il est indispensable de travailler. Les auditeurs de cette tranche d’âge doivent nous découvrir. Il y a aussi un travail de qualité, avec une cohérence aussi à trouver entre les tranches d’informations et les tranches de magazines. Ces magazines doivent jouer leur plein rôle de faire comprendre l’actualité en profondeur. Par exemple, le magazine de Rebecca Manzoni s’est assez facilement installé, avec des résultats plus que convenables et qui ont été salué par la profession. Contrairement à d’autres, nous n’allons pas chercher des stars ou des valeurs très établi parce que je n’ai pas d’argent pour les faire venir, et parce que ce n’est pas notre travail. Nous allons continuer à mettre en valeur des talents en lesquels nous croyons.

RA : Ce n’est pas le cas pour France Bleu, puisque vous avez choisi de faire appel à Patrick Sabatier pour animer la tranche de la mi-journée.
J.-P. C. : Patrick Sabatier nous a présenté un projet qui nous a très agréablement surpris par son adéquation au format de la radio. C’est très astucieux et je pense que c’est très cohérent par rappor au public de France Bleu. Le projet de Patrick Sabatier, après qu’il ait beaucoup écouté nos radios, nous a plu. Ce n’est pas du tout ce qu’il faisait sur d’autres radios. C’est quelque chose de vraiment conçu pour France Bleu et qui nous plaît beaucoup. Il ne faut jamais oublier que France Bleu, ce n’est pas France 3. France Bleu, ce sont des radios locales avec quelques décrochages nationaux. Le travail essentiel est un travail de conduite et de soutien aux équipes.

RA : Les résultats de France Culture sont plutôt bons, mais certaines associations d’auditeurs réclament un retour à une station moins ancrée dans l’actualité que ce qui est proposé actuellement. Qu’en pensez-vous ?
J.-P. C. : J’ai nommé David Kessler avec le plein accord de Laure Adler. Il fait son travail, va écouter toutes les équipes. Je travaille quotidiennement avec lui depuis plusieurs années et les liens d’amitié et de confiance professionnelle font qu’il ne s’est guère passé de semaine sans que nous ne nous parlions. La méthode de David Kessler sur une chaîne aussi exemplaire que France Culture est de parler avec les équipes et les intellectuels. Je ne veux pas penser que les auditeurs de France Culture soient assimilables à des gens qui font des dessins sexistes et grossiers sur Laure Adler. J’ai d’ailleurs déposé une plainte et il est de mon devoir de protéger Laure Adler contre des monstruosités. La réflexion des intervenants, d’éventuelles études qualitatives que nous ferons, les enseignements évidents de la réussite du travail de Laure Adler me paraissent plus importants que des dessins grossiers que je n’accepte pas.

RA : Le Mouv’ se porte toujours aussi bien. Où en êtes-vous dans le développement de la station ?
J.-P. C. : J’espère bien que nous aurons Montpellier et une autre grande ville universitaire le plus vite possible, comme par exemple Grenoble. Ce serait une ville très significative pour Le Mouv’. Pour une radio qui à l’évidence marche bien et répond à une vraie spécificité, c’est indispensable.

RA : La City Radio et France Bleu Melun s’apprêtent à fusionner. Est-ce que vous en attendez beaucoup en termes d’audience et comment comptez-vous installer cette future grande station fracilienne ?
J.-P. C. : Je n’en attends pas des résultats fulgurants, mais ça ne peut que s’améliorer. Nous allons faire une radio fondamentalement différente. Nous avons aujourd’hui deux radios dites de service, insistant sur le trafic. Là, nous allons tout simplement appliquer la recette des France Bleu, c’est-à-dire information, politique, social, économique, culturel et régional. C’est quelque chose qui se fait pas en Ile-de-France. Je ne fixe pas de résultats d’audience, laissons le projet démarrer. Il faut quelque chose de spécifique qui ne peut venir que de nos équipes de journalistes et d’animateurs, c’est-à-dire une information régionale de proximité. Je ne vois pas pourquoi ce qui marche très bien avec France Bleu Provence ne pourrait pas fonctionner dans la durée en Ile-de-France.

RA : Pour être tout-à-fait concret, comment s’appelera cette future station ?
Je n’ai pas encore trouvé le terme, mais nous avons encore six mois. C’est un de nos casse-tête avec Christine Berbudeau, et c’est très difficile un bon terme. La City n’est pas exclu, ni même un France Bleu quelque chose…

RA : Globalement, l’audience de la radio est en baisse sur une vague, comment expliquez-vous ces résultats ?
J.-P. C. : L’écoute de la radio est saisonnière. Si on regarde avril-juin 2004, et avril-juin 2005, l’audience est à peu près stable. Tous les médias sont confrontésà un bouleversement comparable à l’arrivée de la FM. Sauf que c’est un bouleversement multimédia. La presse écrite a les gratuits, la télévision a internet, la radio musicale a le téléchargement et l’Ipod, les radios de fort contenu comme les notres ont internet et les programmes à la demande. C’est évidemment une succesion de défis que nous avons rarement connu. Je ne veux même pas parler du marché publicitaire pour nos confrères du privé. C’est évidemment très complexe. Pour ce qui concerne les radios du service public, nous devons nos résultats à une très grande fidélité à la spécificité de la radio. Nous allons nous aussi faire du téléchargement, mais le coeur de notre métier reste le son.


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