Le groupe Radio France a annoncé son intention de lancer d’ici 2026 une nouvelle station dédiée à la jeunesse, diffusée en radio numérique terrestre (DAB+). Si cette initiative confirme la montée en puissance des offres audio destinées aux jeunes publics, elle suscite aussi des réserves du côté des acteurs indépendants du secteur. Pitchoun Médias – pionnier des radios pour enfants en France – a réagi par la voix d’un communiqué en exprimant ses inquiétudes quant à l’impact de ce futur service public sur son propre média.
Une nouvelle station jeunesse sur le DAB+ en 2026
Radio France, groupe public disposant de moyens conséquents, prépare le lancement d’une radio à destination des plus jeunes d’ici 2026, avec une diffusion exclusivement en DAB+. Selon les informations disponibles, ce projet s’inscrit dans la réorganisation des antennes de Radio France : la station Mouv’ – jusqu’ici orientée vers les adolescents et jeunes adultes – devrait cesser d’émettre sur la FM dès l’été 2025 et en DAB+ d’ici juillet 2026, afin de céder sa place à ce nouveau programme jeunesse sur ces fréquences numériques. Le choix du DAB+ s’explique par les avantages de cette technologie, qui offre une meilleure qualité sonore et une plus grande diversité de programmes que la bande FM traditionnelle. Officiellement, l’objectif affiché par Radio France est de renforcer son offre à destination du jeune public, un segment jusqu’ici peu exploité, en exploitant les capacités accrues du DAB+ pour innover en contenus ludo-éducatifs.
Cette incursion de Radio France dans l’univers des « radios jeunesse » pourrait redéfinir les dynamiques concurrentielles actuelles du secteur. En tant que service public, Radio France bénéficie de moyens financiers et techniques importants pour développer une telle station. Plusieurs observateurs notent qu’une nouvelle concurrence se profile pour les acteurs privés déjà implantés sur ce créneau de niche. Le lancement de cette radio pour enfants par le géant public soulève donc des attentes en termes de contenus inédits, mais aussi des interrogations sur l’équilibre du paysage radiophonique jeunesse en France.
Pitchoun Médias, pionnier de la radio enfantine
Face à ce projet ambitieux, Pitchoun Médias est en première ligne. Fondé en 2016 par Laurent Brochet, ce groupe indépendant s’est imposé comme le premier acteur audiovisuel français entièrement consacré aux enfants et aux familles. Son fleuron, Radio Pitchoun, fut lancé sur la bande FM azuréenne avant de s’étendre à l’échelle nationale via le DAB+. Aujourd’hui, Radio Pitchoun est diffusée en numérique terrestre dans les principales agglomérations de l’Hexagone – de Paris à Nice, en passant par Marseille, Lyon, Toulouse ou Strasbourg – ce qui lui permet de toucher un large public jeune. La grille des programmes de Pitchoun se distingue par son caractère ludo-éducatif : tout au long de la journée, des animateurs proposent chansons, comptines, histoires et rubriques conçues pour les 3-12 ans, un contenu adapté aux plus jeunes auditeurs tout en intéressant leurs parents. Il y a huit ans, parier sur une radio 100% enfants relevait du défi dans un paysage médiatique encore très généraliste, mais Pitchoun Médias a depuis fait figure de précurseur dans ce domaine.
Inquiétudes et appel à « l’union » face à l’arrivée du service public
Dans un communiqué de presse diffusé début mai, Pitchoun Médias a fait part de vives inquiétudes après l’annonce du projet de Radio France. Le groupe indépendant redoute que l’arrivée d’une station publique dédiée à la jeunesse ne « menace l’équilibre économique » de son média, en augmentant la concurrence pour les ressources publicitaires et les partenariats. Pitchoun Médias souligne qu’il n’a pas été informé en amont de ce projet et regrette ce manque de concertation. Il insiste ainsi sur l’importance d’envisager “une synergie possible entre les deux entités”, plutôt qu’une rivalité frontale, afin de ne pas fragiliser davantage les acteurs existants.
Malgré ses réserves, Pitchoun Médias se dit non hostile à l’initiative de Radio France, adoptant un ton constructif. « Nous n’avons aucune hostilité envers le groupe Radio France, dont nous respectons le travail. Mais nous rappelons que l’union fait la force, surtout lorsqu’il s’agit de soutenir des initiatives dédiées à la jeunesse », déclare ainsi le communiqué de Pitchoun Médias. Par ce message, le pionnier des radios enfantines appelle clairement à la coopération avec le service public – « l’union fait la force » – afin d’unir les efforts au bénéfice des jeunes auditeurs, plutôt que d’entrer dans une logique de concurrence qui pourrait affaiblir l’écosystème existant. Pitchoun Médias en profite pour réaffirmer son « engagement à offrir une radio libre, indépendante et proche des enfants et des familles » et en appelle à la « responsabilité collective pour préserver la diversité » du paysage radiophonique français. Fort de ses huit années d’expérience sur ce créneau, le groupe entend poursuivre sa mission d’éducation et de divertissement des plus jeunes, tout en espérant que l’arrivée de Radio France se fera dans un esprit de complémentarité plutôt que de confrontation directe.
Contexte : essor du DAB+ et des radios jeunesse en France
La réaction de Pitchoun Médias intervient dans un contexte d’essor rapide du DAB+ sur le territoire français. La radio numérique terrestre, lancée en 2014, a véritablement accéléré son déploiement ces dernières années. Début 2025, la couverture DAB+ a dépassé 50% de la population métropolitaine, et toutes les communes de plus de 50 000 habitants sont désormais desservies. Pas moins de 557 stations de radio – publiques comme privées – diffusent déjà leurs programmes en DAB+ à travers le pays, selon l’Arcom. Cette technologie vient compléter la diffusion FM dont la bande de fréquences est aujourd’hui saturée, ce qui a ouvert la voie à de nouvelles radios thématiques sur le numérique. Dans le paysage des radios jeunesse, l’offre restait jusqu’ici limitée. Hormis quelques antennes musicales s’adressant aux adolescents ou jeunes adultes (NRJ, Fun Radio, Skyrock, et Mouv’ du côté du service public), il n’existait quasiment aucune station hertzienne dédiée aux enfants. C’est grâce au web et au DAB+ que des projets comme Radio Pitchoun ont pu voir le jour et se développer, en trouvant sur la bande numérique la place qui leur manquait en FM.
Le lancement envisagé d’une radio jeunesse par Radio France s’inscrit donc dans cette tendance d’enrichissement de l’offre à destination des plus jeunes. Il témoigne de la reconnaissance grandissante de ce public par les grands médias, tout en soulevant la question de la coexistence entre le nouvel entrant public et les acteurs privés pionniers. L’issue de ce projet – concurrence frontale ou coopération synergique – sera observée de près par l’ensemble du secteur. Pour l’heure, Pitchoun Médias espère que son appel à l’union sera entendu, afin que l’arrivée d’un poids lourd comme Radio France dans l’univers des radios pour enfants se traduise par un élargissement de l’offre sans compromettre la diversité et l’équilibre du paysage radiophonique français.