Maurice Radio Libre – Entretien avec Maurice

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RadioActu : Vous revenez avec un nouveau projet sur le net. En quoi consiste ce projet de webradio et que va t-on y trouver ?
Maurice : J’avais envie d’essayer quelque chose de neuf. J’a essayé la syndication pendant cinq ans, ça a donné ce que ça a donné et j’ai décidé d’arrêter parce qu’il aurait fallu grossir et ajouter des partenaires pour qu’on ait un peu de fric et ça ne pouvait pas ressembler à ce que j’avais imaginé. J’ai pesé le pour et le contre, j’ai discuté avec l’équipe et j’avais besoin d’arrêter pendant un petit moment pour faire autre chose. Aujourd’hui, l’idée c’est de faire la première radio européenne financée par les auditeurs, autrement dit par ceux qui ont envie de l’écouter. C’est de faire une radio qui sera capable de disparaître s’il n’y a pas le fric, et nous allons essayer de la créer et de la faire tourner seulement s’il y a suffisamment de gens pour l’écouter.

RA : C’est un concept extrêmement novateur. Pensez-vous que votre projet soit suffisamment fort pour décider les auditeurs à payer pour vous écouter ?
M. : C’est une vraie question. Le challenge c’est d’essayer de savoir s’il y a suffisamment de gens intéressés par le programme que je suis susceptible de mener et capables de mettre ce qu’ils veulent sur la table pour que ce soit viable. La réponse peut être non le 1er septembre, et je n’en garderai pas d’amertume. On aura essayé et j’inventerai un autre truc plus tard. Je ne suis pas en train de me dire que je suis un mec incontournable et que je suis sûr que les gens vont venir. Mon discours, c’est de dire : « essayons, s’il y a des gens pour le faire, faisons-le ! ». Il n’y a pas de raisons pour que vive Radio France et ses 44 stations – je ne suis pas en train de cracher sur Radio France – dont l’argent provient de notre impôt, la redevance, et la pub. Et on ne risque pas d’avoir les huissiers si on ne paie pas sa redevance pendant que les gens de Radio France et de France Télévisions demandent des augmentations de salaires pour cette télé qu’on n’a pas toujours envie de regarder ! Il n’y a pas de ticket d’entrée minimal pour ce programme. Pour l’instant, c’est plutôt bien parti. Si on faisait d’ici au 1er septembre 3 fois ce que sont les promesses de dons d’aujourd’hui, on pourrait le faire. Nous allons aussi proposer à des radios de diffuser le programme, mais il faudra aussi qu’elles mettent un peu de ronds sur la table. On va faire du direct payant et en public chaque semaine depuis un endroit dans Paris. Il y aura un best of le lundi, trois directs dans la semaine et une émission en public et en direct le vendredi.

RA : Hormis votre talk-show du soir, que va t’on trouver sur cette radio ?
M. : Ce sera évidemment un programme rock. Il y aura sans doute une autre émission. J’ai sous le coude une fille qui est dans ma couleur et qui est susceptible de faire une émission. Mais nous n’allons pas lancer ça tout de suite. Il faut d’abord que le produit lui-même soit assez léger, et ensuite nous aurons une discussion. Il y aura donc du rock 24h/24, et j’espère que nous pourrons faire du live avec des groupes qu’on entend un peu moins.

RA : Vous êtes un personnage qui a marqué la FM, et vous avez disparu d’un seul coup pendant deux ans. Qu’avez vous fait pendant ces deux années ?
M. : J’ai roulé. Je suis sur le point de finir un bouquin qui sera aussi sur le site, puisque je propose aussi à ceux qui le veulent, d’insérer leur photo dans un petit cahier. Je me suis baladé, j’ai vu des gens que je n’avais pas vu depuis longtemps. Je me suis intéressé à mon existence personnelle comme je ne l’avais jamais fait de ma vie (rires). Je ne ferais pas que ça, mais si on fait le tour des gens qui font ce métier, quasiment tout le monde a arrêté à un moment. Il faut écouter les autres, c’est ce que j’ai fait. J’ai regardé la téloche, j’ai pris le temps d’écouter les radios en France et à l’étranger. Je n’ai pas arrêté de faire du direct depuis 1986. J’ai fait une ligne droite, et si on ne veut pas se ringardiser et si on veut savoir ce qu’il se passe dans la société, il faut arrêter pour la regarder.

RA : Vous donnez un peu l’impression de vous être assagi par rapport au Maurice un peu rebelle, un peu grande gueule que l’on connaissait. C’est une fausse impression ?
Je pense que c’est une fausse impression. Je ne suis pas un rebelle. Je n’ai à me rebeller contre rien. Je suis un mec qui a envie d’essayer, de créer des choses. C’est vrai que les gens chez nous aiment bien les caricatures. Il faut que les bleus soient bleus, que les rouges soient rouges. Je ne suis pas un mec qui s’est assagi, je suis quelqu’un de normal. Je ne suis ni plus assagi ni plus énervé, j’ai toujours été normal dans ma propre normalité. Il n’y a pas de raisons pour que je sois tout le temps en train de crier.

RA : Quel regard portez-vous sur la FM actuelle et sur les libres antennes qu’on peut entendre sur certains réseaux ?
M. : Nous sommes dans un pays qui ne veut pas créer grand chose. J’applaudis des deux mains ceux qui font, comme Difool, Max et les autres. C’est vachement bien qu’ils continuent, mais je pense qu’on a besoin d’essayer autre chose car on est un peu monocordes. Je pense qu’un mec comme moi a sa place, qu’une nana comme Macha Béranger a aussi sa place, mais il faudra qu’elle se trouve une relève, elle, parce que moi je suis encore jeune. On est dans un système publicitaire, et c’est aussi pour ça que j’essaie de créer autre chose. Ce système étouffe la radio. Aujourd’hui, ceux qui créent passent après ceux qui font rentrer l’argent. Les centrales d’achats sont un peu sclérosées et ont un discours qui est vachement vieux. Ce n’est pas un problème d’animateurs ou de directeurs des programmes. C’est un problème de ringardise du système publicitaire. En France, on n’a toujours pas compris que l’important ce n’est pas qu’il y ait 150 000 personnes qui entendent le nom du paquet de sucre, mais qu’il valait mieux qu’il y ait moins de monde qui entende ce nom et plus de gens qui l’achètent. On ne s’en sortira pas tant que les grands commerçants, ceux qui ont vraiment le fric et qui font vivre la radio et la télévision ne se seront pas mis réellement à compter le fric. C’est ce que font les petits commerçants quand ils vont vers une radio locale. Ces gens là sont comptables du nombre de personnes supplémentaires qui rentrent dans leurs commerces.

RA : Votre projet est donc aussi une alternative à ce qu’on entend ailleurs. Pensez-vous que les patrons de radios ne sont plus réceptifs aux types de programmes que vous pouvez proposer ?
M. : Non, pas du tout. Il y a des gens qui me font des propositions aujourd’hui auxquelles je ne suis pas fermé. Mais je pense que si on veut se sortir de ça, il va falloir que les centrales d’achats changent de discours. Si je voulais bosser sur une radio, je trouverai !

RA : Vous avez écouté des milliers d’auditeurs pendant tes émissions. Comment percevez-vous l’évolution de la société et en particulier des jeunes depuis une quinzaine d’années ?
M. : Pour moi, il y a deux choses. Je ne suis pas très représentatif, parce que j’ai un public particulier. Il y a ceux que j’appelle les « neuneus », les mecs qui voient des chaussures bleues aux pieds de tout le monde et qui les mettent, et qui sont prêts à tuer leurs parents pour les avoir. Et puis il y a une autre partie de la population dont on s’occupe moins et qui sont des gens qui ont envie d’échanger. Ce sont les mecs qui découvrent la France en partant en vacances dans les Cévennes et qui sont capables de se poser des questions. Nous sommes dans un pays qui a deux vitesses : le tout venant, et ceux qui choisissent. Pour moi, il y a une vraie césure. Je ne cesse de recevoir des messages des gens, et dans ceux qui m’écrivent, il y a ceux qui sont un peu « cul-cul » et qui s’imaginent que eux vivent des choses que les autres ne vivent pas. Et puis, il y a ceux qui sont capables d’échanger, de discuter, qui profitent du Net pour communiquer, envoyer des photos, montrer des choses.

RA : Est-ce qu’on pourrait vous définir comme un altermondialiste de la FM ?
M. : Non, parce que l’altermondialisme, ça me fait chier. C’est ennuyeux comme truc. Je trouve que tous ceux qui portent ce mouvement sont ringards et en dehors de la société. Je ne pense pas qu’il faille déconstruire NRJ et RTL. Je crois que ce sont des stations qui sont les moteurs principaux de la FM et de la radio en général et il faut que ces gens existent. Je suis beaucoup moins séduit par le GIE Les Indépendants, pour ne citer qu’eux, qui ne font que copier ce que fait NRJ mais en moins bien. « On est moins forts, mais on dit qu’on est indépendants », alors qu’ils sont commercialisés par Lagardère qui est un groupe plus gros que celui de Baudecroux. Les altermondialistes m’ennuient car leurs discours est chiant. On peut très bien vivre dans une société extrêmement moderne avec le dernier Airbus et en même temps des mecs qui font des petits avions pour quatre personnes dans leurs villages. Je crois à la radio qui est le monstre, comme NRJ, et je crois à Maurice Radio Libre, qui est la radio sans pub avec dedans des gens qui sont intéressés par le truc et qui de toute façon ne pourra pas entrer en concurrence avec NRJ. Ca répond à une demande.

.: Maurice Radio Libre sur Internet :.http://www.mauriceradiolibre.comwww.mauriceradiolibre.com


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